Cornelius de Pauw et ses Recherches philosophiques sur l’espèce humaine. Contours et contextes au XVIIIe siècle
Journée d'étude, Université de Constance, 7 octobre 2022
Le nom de Cornelius de Pauw ne figure jamais sur la liste des « grands » philosophes européens du Siècle des Lumières. Dans le domaine français, il n´apparaît que très exceptionnellement à l´instar de ceux de Diderot, Voltaire, Rousseau et Montesquieu. Pour tout dire, contrairement à son époque, on ne le considère de nos jours que comme un philosophe mineur, tout au plus digne d´être connu des spécialistes du XVIIIe siècle – et cela, à tort ?
Ses « Recherches philosophiques » sur les Américains (1768), sur les Égyptiens et les Chinois (1773) et celles sur les anciens Grecs (1787) font preuve de l´engagement anthropologique et historique de ce chanoine hollandais de la cathédrale de Xanten qui fût un certain temps lecteur de Frédéric II à sa cour de Postdam et collabora aussi au Supplément à l´Encyclopédie de Diderot.
L´Europe est à la fois le point de départ et l´incontournable point de référence de ses études. Et il ne fait aucun doute que de Pauw avait aussi intérêt à déterminer le statu quo de sa propre civilisation, qu´il croyait, bien que corrompue, essentiellement supérieure à toutes les autres. Son jugement de valeur euro-centrique a influencé une bonne partie du XIX siècle, mais il est devenu de nos jours et à juste titre la cible de la critique postcoloniale.
Néanmoins, une lecture historique du chanoine de Xanten ne manque pas d´intérêt, puisqu´il a su renouveler efficacement le débat sur l´humanité. Ses recherches philosophiques sur l´histoire naturelle se positionnent par rapport à certaines thèses et tendances majeures du savoir européen de son époque. A partir d´exemples concrets du passé et du présent de peuples les plus divers, de Pauw s´est mis à la recherche d´un ordre social idéal et, pour cela, il a voulu étudier les circonstances susceptibles de le favoriser ou bien de l´entraver. À la fois et jusque dans leur hardiesse, les « Recherches philosophiques » de ce brillant érudit servent à mettre en question son dispositif épistémique, qui était bien celui de son époque.
En conjuguant ainsi une approche interne et externe de l´œuvre de de Pauw, et ce, pour la première fois depuis l´étude essentielle d´Antonello Gerbi (1955), nous accorderons au chanoine philosophe de Xanten une attention sans partage. Il se pourrait même que relire de Pauw nous mène à changer la notion que nous avons de la pensée et de l´écriture inhérentes aux Lumières, et, par là même, aussi celle de leur rapport à ce que nous appelons par trop simplement « la » modernité.
Programme
9h Accueil & Introduction
9h30 Maxime Ladrière (Genève): Cornelius de Pauw (1739-1799), le pamphlétaire et le philosophe
10h Olivier Contensou (Laval): Articuler les thèmes et les sources: Eschine, Démosthène et Aristote dans les Recherches philosophiques sur les Grecs (1787-1788)
10h30 Discussion
11h Café
11h30 Andrea Renker (Graz): La forme du récit dans les discussions sur l’espèce humaine chez Cornelius de Pauw (1739-1799) et Gianrinaldo Carli (1720-1795)
12h Damien Tricoire (Trèves): Cornelius de Pauw et les images de la Chine dans l’Europe des Lumières
12h30 Discussion
13h Déjeuner
14h Susanne Greilich (Ratisbonne): Denis Diderot: Lecteur de De Pauw
14h30 Anne Kraume (Constance): „Una pluma teñida en sangre de caníbales“: Cornelius de Pauw à l’aube de l’indépendance hispano-américaine
15h Discussion
15h30 Café
16h Tommaso Meozzi (Graz): La dimension analogique dans L’Esprit des lois de Montesquieu
16h30 Philipp Lammers (Constance): Renversement des alliances. Querelle du vers et imaginaire géographique
17h Discussion
17h30 Conclusion
19h30 Dîner